Les pressions de l’Ingénieur…. Pas vraiment ?
Un Ingénieur subit de nombreuses pressions au travail. Le quotidien se résume à gérer des urgences qui changent en permanence, l’urgence de la veille passe aux oubliettes. La notion de priorité en perd son sens. D’ailleurs qui définit les priorités de l’Ingénieur ? Dans une structure matricielle, l’Ingénieur a 2 responsables, son responsable fonctionnel (le projet) et son responsable hiérarchique.
L’ingénieur doit également gérer la contrainte du temps mais également la contrainte technique. Bien que les délais se réduisent, le droit à l’erreur, bien qu’existant dans les « Chartes de l’éthique » n’existe pas. Toujours plus vite, oui, mais toujours « faire bien du premier coup ». Tout le monde a conscience des contraintes économiques, des contraintes de temps, et travailler dans cet environnement entraîne obligatoirement l’apparition d’erreurs. Malheureusement, la hiérarchie a tendance à nier ses propres responsabilités, et l’histoire montre que l’on recherche un coupable aux problèmes.
Le temps manquant, le travail est de moins en moins préparé. Il faut agir, vite et maintenant. « Si j’avais 6 heures pour abattre un arbre, je passerai les 4 premières à affuter ma hache ». Abraham Lincoln. Cette citation est profondément vraie. Il faut savoir se poser, savoir quel est le but final avant de se lancer. Jeune ingénieur, dans plusieurs réunions, j’ai assisté à des « Il faut faire ceci ou cela ». Une personne pose la question suivante : « Oui, mais pourquoi ? ». Là où on devrait s’attendre à une explication rationnelle, la personne ne sait quoi répondre. Et il s’avère que le travail qu’elle demandait (mettre en place des indicateurs) n’était utile pour personne.
L’Ingénieur subit une pression importante, mais doit également veiller à gérer la pression que lui-même met sur ses collaborateurs, cadres ou techniciens. Il est clair que dans cet environnement instable, l’Ingénieur doit veiller à garder un cap, une cohérence d’ensemble. L’ingénieur doit veiller à mettre en place « des soupapes ». Oui, prendre des cafés avec ses collègue fait perdre du temps à l’entreprise, cela a un coût, mais c’est également le moyen de respirer, il s’agit d’un investissement.
Les contraintes économiques et calendaires peuvent forcer l’ingénieur à choisir des solutions techniques qui sont contre ses propres principes, qui ne le satisfont pas intellectuellement. Et ceci tout en assurant que cette solution soit tout de même satisfaisante pour le client, la sécurité…
Le culte de l’indicateur. L’ingénieur doit montrer que son travail avance pour rassurer sa hiérarchie et son client. Il en résulte un culte de l’indicateur. Toujours plus, toujours plus. Pour gérer son activité, l’ingénieur doit mettre en place une foultitude d’indicateurs, qui ressemble à si m’éprendre au tableau de bord d’un Boeing. Mettre à jour ses indicateurs consomme du temps qui n’est plus consacré à la réalisation des tâches. Bien qu’important, il faut savoir aller à l’essentiel. En poussant à l’extrême, un ingénieur est capable de passer sa semaine de travail à mettre à jour les indicateurs sans passer une heure sur l’avancement de son travail…. Paradoxalement, lorsque les indicateurs ne sont pas bons, il y a également des tentatives pour le faire changer de couleurs, pour l’interpréter. C’est ce que l’on nomme entre nous les indicateurs Pastèques : rouge à l’intérieur mais vert à l’extérieur.
Bien que le tableau dressé soit un peu sombre, le travail de l’ingénieur reste intéressant, participer à la construction de projet pour demain reste quelque chose d’existant. Le métier de l’ingénieur peut se résumer à transformer des idées, les faire vivre et les transformer en réalité.
Je vous recommande l’excellent livre suivant sur ce sujet de Christophe Déjours :
Souffrance en France : La banalisation de l’injustice sociale